Dès que la rétrospective de la vie sur terre s’estompe, vient le moment pour l’âme de «digérer» sa vie passée. A ce stade, le défunt est confronté encore une fois avec tous les événements de sa vie passée. Nombreux sont les contemporains qui éprouvent de la difficulté à comprendre que l’âme humaine doit préparer son entrée dans le monde des esprits à proprement parler. C’est que ce processus de purification a été trop souvent malmené par le pouvoir et les doctrines.
Pour ceux qui sont familiers avec la réincarnation telle qu’elle est présentée dans l’anthroposophie, il s’agit d’un long cheminement inexorable à travers les mondes supérieurs, parcours bien différent d’un séjour où l’on souffrirait de la chaleur et du froid.
Il va de soi que les expériences des sens sont source de plaisir pour tous les vivants. Dans la vie après la mort, l’âme doit néanmoins s’habituer à exister sans disposer des organes des sens. Le vécu n’en est pourtant pas moins riche ni intense que sur terre. Selon l’individu, le processus de s’habituer à cette absence est vécu comme une douleur qui peut être assimilée à un sentiment de froid ou de chaud.
Lors du passage à travers ces mondes des âmes, l’âme revit l’ensemble de son parcours terrestre, mais en sens inverse. Elle a elle-même la force de porter un jugement sur sa propre vie. Ces jugements engendrent une première envie de renaître pour compenser les échecs ou ce qui est resté inachevé.
La durée de ce processus correspond à peu près à un tiers de la vie passée.
La voie est ensuite libre de toutes les charges terrestres. L’âme quitte le monde des âmes pour entrer dans le monde des esprits.
Citations sur ce thème tirés de l’oeuvre de Rudolf Steiner:
«…Le pas suivant consiste pour le Moi à se libérer de cet attachement au monde extérieur. Le Moi doit se soumettre à une sorte de purification et de libération. Il lui faut extirper de lui-même tous les désirs qu’il a engendrés dans le corps et qui n’ont pas droit de cité dans le monde spirituel…»
Ex : La Science de l’occulte. Chapitre : Le sommeil et la mort. GA 13, EAR 1994, page 95
«Il pourrait sembler effrayant qu’un espoir uniquement réalisable par des organes sensoriels doive se transformer après la mort en désespérance, [....] en privation brûlante [....]. Si ces désirs n’étaient pas extirpés, la perception consciente de l’être aimé ne pourrait jamais avoir lieu après la mort. Vu de cette façon, ce que pourraient avoir effrayant ou de désespérant les phénomènes qui suivent la mort, tels que doit les décrire la science suprasensible, se transforme et devient pleinement satisfaisant et réconfortant.»
Ex : La Science de l’occulte. Chapitre : Le sommeil et la mort. GA 13, EAR 1994, pages 95 et 97
«Les expériences suivantes, vécues après la mort, sont encore à d’autres égards entièrement différentes de celles vécues pendant l’existence. Au cours de sa purification, l’être humain vit en quelque sorte à rebours. Il repasse tout ce qu’il a vécu au cours de sa vie depuis sa naissance. [....] Mais maintenant il revit tout cela en sens inverse. Quelqu’un qui [....] a causé une douleur physique ou morale à quelqu’un d’autre, revivra cet incident [....] et ressentira la souffrance qu’il a causée à cette autre personne.»
Ex : La Science de l’occulte. Chapitre : Le sommeil et la mort. GA 13, EAR 1994, page 97
Sich aus dem Unerledigten herausarbeiten
«…Toujours est restée, en quelque sorte, entre les lignes du livre de la vie, une part de désirs, de souhaits, d’amour pour les autres et ainsi de suite. Ce qui est resté inaccompli dans la dernière vie, notre regard spirituel se porte dessus avec envie, un désir qui s’étend sur des années…»
Ex : Vie intérieure, mort et immortalité. Conférence publique du 8 avril 1914 à Vienne : Vie, mort et immortalité de l’âme : que peut dire la science de l’esprit ? GA 153, Triades 1993, page 48
Se déshabituer – les liens perdurent néanmoins…
«C’est pourquoi nous pouvons dire : après la mort, des années s’écoulent durant lesquelles l’âme est occupée à s’arracher peu à peu à la dernière vie, à se déshabituer du lien avec la dernière vie. Ces années passent de telle manière que nous ne sommes nullement arrachés aux expériences vécues lors de notre vie précédente. Nous sommes en lien avec les êtres humains que nous avons quittés, que nous avons aimés ; mais nous leur sommes liés du fait que, pendant la vie, nous avons acquis certains sentiments et rapports avec eux ; nous sommes donc liés avec eux par le biais de ce que la vie nous a offert ou nous a refusé. [....] Après la mort, on partage l’existence des vivants, mais aussi celle des défunts avec lesquels on a eu un lien durant la vie. On doit donc se représenter la vie après la mort de telle façon qu’elle se déroule ainsi pendant des années…»Ex : La science de l’esprit, un trésor pour la vie.
Conférence du 19 mars 1914 à Berlin : L’Homme entre la mort et une nouvelle naissance. GA 63, EAR 2015, pages 301 et 302
Atteindre la maturité pour entrer dans le monde des esprits
«Et quand nous sommes revenus à notre naissance, nous sommes mûrs pour déposer aussi ce qui, en notre corps astral, est imprégné de l’élément terrestre. Cela s’écarte de nous, et ce dépôt de notre corps astral nous fait entrer dans un nouvel état. Je dirais que notre corps astral enchaînait toujours notre vécu à la terre. Tant que nous devons le traverser, non plus en rêvant comme nous le faisons sur terre, mais en revivant à rebours les expériences que nous avons faites sur terre, nous sommes encore dans ce qui est terrestre. C’est seulement quand nous avons déposé notre corps astral – le verbe ‘déposer’ est inadéquat, mais la langue ne possède aucun mot pour cela – que nous sommes entièrement libérés du terrestre. Nous vivons dès lors à l’intérieur du monde des esprits à proprement parler.»
Ex : Le lien entre les vivants et les morts. Conférence du 22 février 1916 à Leipzig. La mort et les événements après la mort. GA 168, EAR 2013, page 93